Vous avez reçu un prix national aux Trophées de la Participation et de la Concertation 2019, parlez-nous du projet qui a été primé
« Mutterholtz 2050, demain commence aujourd’hui » s’inscrit dans la dynamique que j’ai impulsée au sein de mon association depuis que j'ai suivi la formation qualifiante « Pilote de dispositifs participatifs » de l’Ifrée. La maison de la Nature a longtemps mené des projets de sensibilisation, puis elle s’est tournée vers l’accompagnement et nous nous engageons aujourd’hui fortement dans l’animation de démarches participatives.
Ce qui a motivé la mise en œuvre de ce projet c’est l’envie de proposer une modalité pour répondre collectivement aux enjeux de la transition écologique à l’échelle d’un village de 2 000 habitants, en favorisant le pouvoir d’agir des habitants, pour aborder positivement les changements en cours et à venir.
Nous avons d’abord recueilli la parole des habitants de la commune de la façon la plus large possible : enquêtes auprès des jeunes, du club des ainés, en sortie d’école, de commerces, dans les boîtes aux lettres… 11 % de la population du village s’est exprimée. Puis, nous avons restitué cette parole lors d’un week-end festif de lancement du projet. Certains habitants souhaitaient mener des actions très vite. Nous les avons accompagnés pour les aider à valider leur idée au vu des enjeux de transition (est-ce que mon idée résout un problème lié à la transition qui n’a pas encore de solution existante ?) et à passer d’une idée individuelle à un projet collectif. Sont nés ainsi, un espace de gratuité sur le marché, un atelier couture-réparation, un café littéraire, un projet de jardin partagé… D’autres s’inscrivent aux soirées de réflexion autour de deux thèmes forts ressortis du recueil initial : le vivre ensemble et la mobilité douce. Au total, ce sont 70 personnes qui participent de près ou de loin au projet et on note que ce ne sont pas les citoyens écologistes déjà très investis dans les projets existants sur le territoire (centrale photovoltaïque citoyenne, pressoir à jus de pomme…), mais des personnes que nous n’avions pas encore croisées dans nos actions et qui ont trouvé là un moyen d’exprimer et de mettre en œuvre leurs envies pour le changement.
En quoi, la formation de l’Ifrée vous a-telle aidée dans l’atteinte de vos objectifs ?
Avant nous rêvions nos projets au sein de l’association et nous cherchions ensuite à y faire adhérer les citoyens. Aujourd’hui j’ai mesuré à quel point il est plus intéressant de faire rêver leurs projets aux gens, en proposant un cadre et en les sollicitant sur leurs envies. J’ai vraiment abandonné toute projection de nos propres envies sur les gens, pour me centrer sur leurs préoccupations, ce qui les touche, car c’est cela qui les mobilise. Au départ c’est assez insécurisant, mais quand on voit ce que ça produit comme investissement chez les participants, on ne souhaite plus faire autrement. Quand il nous arrive de reporter des dates de réunions, les participants nous appellent pour nous proposer de prendre le relais dans l’organisation car ils ont à cœur de ne pas laisser retomber la dynamique !
La formation de l’Ifrée m’a également apporté les méthodes qui permettent cette mise en œuvre : animer des temps pour que le travail soit réellement collectif, prendre en compte la parole de chacun, soutenir l’expression… créer un espace de non jugement, de respect et de confiance qui permet à chacun de s’investir. C’est sans doute aujourd’hui la plus-value et la complémentarité de notre projet par rapport aux mouvements citoyens spontanés où des fortes personnalités prennent souvent le dessus dans les discussions et l’élaboration des projets.